Une gingivoplastie en toute sécurité
avec Romain CEINOS
Le processus d'éruption dentaire se divise en deux phases : une phase active au cours de laquelle la dent émerge dans la cavité buccale, et une phase passive qui se caractérise par le déplacement vers le bas des tissus gingivaux recouvrant la partie visible de la dent (1). Une situation qui est qualifiée d'éruption passive altérée ou retardée lorsqu'il y a un déplacement insuffisant du bord gingival (chez les adultes), le plaçant au niveau de la partie basse de la couronne, loin de la jonction entre l'émail et le cément.
Plusieurs raisons peuvent expliquer cet échec de la phase d'éruption passive. Les conséquences sont variées, notamment un impact esthétique avec un sourire exposant des dents courtes et carrées. Selon la classification de l'éruption passive (déterminée par la largeur du tissu kératinisé et la position de la crête osseuse) (2), diverses approches thérapeutiques sont envisageables, avec ou sans modelage osseux.
Lorsque le sommet de la crête osseuse est en normo-position (environ 1,5 mm de la jonction amélo-cémentaire) et qu'il y a une épaisseur adéquate de tissu kératinisé, une simple gingivectomie sans repositionnement apical de lambeau peut être réalisée. Le défi réside alors dans le maintien du cément radiculaire sans l'exposer de manière accidentelle lors de la correction de l'excès de gencive. Une astuce simple consiste à fixer un cône de gutta-percha de dimensions connues sur la couronne clinique à l'aide d'une résine composite fluide, avant de réaliser une radiographie périapicale (3). En comparant la longueur réelle du cône de gutta-percha avec sa longueur sur la radiographie (afin de corriger toute distorsion d'image), on peut calculer la distance exacte entre la marge gingivale et la longueur réelle de la couronne dentaire (en identifiant le contour de la JAC). Ensuite, en utilisant une sonde, cette distance est reportée sur la gencive. La gingivectomie à biseau interne, réalisée au scalpel est ainsi guidée en suivant les repères établis, en évitant tout excès ou insuffisance de correction.
(1) Gottlieb B, Orban B. Active and continuous passive eruptions of teeth. J Dent Res. 1933;13:214.
(2) Coslet JG, Vanarsdall R, Weisgold A. Diagnosis and classification of delayed passive eruption of the dentogingival junction in the adult. Alpha Omegan. 1977 Dec;70(3):24-8.
(3) Mele M, Felice P, Sharma P, Mazzotti C, Bellone P, Zucchelli G. Esthetic treatment of altered passive eruption. Periodontol 2000. 2018 Jun;77(1):65-83.
Fig 1. Phase orthodontique d'une prise en charge pluridisciplinaire de correction d'une bi-proalvéolie |
Fig 2. A l'issue du traitement orthodontique, un cône de gutta millimétré est collé en vestibulaire, afin de déterminer radiologiquement la distance entre la marge gingivale et la JAC de ce cas d'éruption passive altérée. |
Fig 3. |
Fig 4. Le traitement se termine par la correction de forme des incisives latérales riziformes à l'aide de facettes pelliculaires en céramique. |
Fig 5. |
Fig 6. |
Fig 7. |